UFC-Que Choisir fait condamner Valve pour avoir interdit la revente des jeux dématérialisés
Pour avoir interdit la revente des jeux dématérialisés sur sa plateforme, Valve a été condamné en France.
C’est une grande victoire pour les joueurs qui vient d’être obtenue par l’UFC-Que Choisir. L’association de défense des consommateurs a obtenu gain de cause sur de nombreux sujets, comme l’indique la décision du Tribunal de Grande Instance de Paris du 17 septembre. Notamment au sujet de la revente des titres dématérialisés.
Il y a trois ans, l’association assignait Valve en justice sur une dizaine de clauses jugées abusives. Et plus particulièrement sur la revente des droits d’accès et d’utilisation aux jeux sur Steam. Trouvables dans l’accord de souscription de la plateforme, ces clauses stipulent qu’il n’est pas autorisé de vendre, facturer ou transférer à un tiers les droits d’utilisations d’un compte, ni le droit d’utiliser les souscriptions. Pour résumer : vous achetez un jeu dématérialisé, vous ne pouvez le revendre. Au contraire d’un jeu physique.
Matériel contre immatériel
Revendre une oeuvre physique est autorisée par la loi. C’est le concept de « l’épuisement des droits ». Cette règle permet à un éditeur de contrôler la distribution de son produit. Mais une fois cédé, il n’est pas possible d’empêcher la libre circulation des exemplaires d’une œuvre. L’acquéreur est donc libre de revendre l’objet, sans autorisation préalable.
Et c’est sur ce point que s’est jouée l’affaire. Le site Next Impact relate le déroulement du jugement au TGI de Paris. D’un côté Valve, soutenant que cette règle ne vaut pas pour les licences en ligne. De l’autre l’UFC-Que Choisir, pour qui l’acheteur doit pouvoir revendre d’occasion les jeux, même dématérialisés.
L’association s’est appuyée sur des directives européennes, dont une de 2001 sur l’harmonisation des droits d’auteur et une autre de 2009 au sujet de la protection juridique des logiciels. Et c’est la thèse qui a été retenue par le tribunal. Les deux directives mentionnent la règle de l’épuisement, sans distinction entre oeuvre physique ou dématérialisée.
« Le titulaire du droit concerné ne peut plus s’opposer à la revente de cette copie (ou exemplaire) même si l’achat initial est réalisé par voie de téléchargement. L’éditeur du logiciel (ou ses ayants-droit) ne peut plus s’opposer à la revente de cette copie ou exemplaire, nonobstant l’existence de dispositions contractuelles interdisant une cession ultérieure. »
Décision du Tribunal de Grande Instance de Paris datant du 17 septembre 2019
Voici donc Valve obligé de revoir sa copie. La défense consistant à expliquer que le jeu n’était acquis qu’à travers un abonnement n’a pas été retenu. Puisque les jeux sont mis à la disposition de l’utilisateur de manière illimitée, le tribunal a estimé qu’il s’agit dans les faits d’un achat.
Et maintenant ?
De nombreuses clauses de l’accord de souscription ont donc été jugées abusives par le TGI. Valve va devoir les supprimer, mais également publier sur Steam pendant 3 mois un lien pointant vers l’intégralité du jugement. L’éditeur a un mois à compter du jugement pour s’y soumettre.
Le tribunal a par ailleurs rappelé que l’ensemble des offres de l’éditeur est régi par le droit français lorsqu’il concerne les utilisateurs français, peu importe l’origine de l’entreprise. En théorie, cela va donc obliger Valve à proposer la revente des jeux sur sa plateforme. Mais il faudra attendre longtemps avant que le géant américain daigne s’y soumettre, d’autant plus que la décision du TGI de Paris peut encore faire l’objet d’un appel. Quoi qu’il en soit, ce jugement représente une victoire pour les joueurs et leurs droits.