Les équipes de Diablo IV, de nouvelles proies du crunch
Rien d'étonnant dans cette histoire malheureusement.
Très attendu des joueurs, et en pleine campagne promotionnelle, le prochain action-RPG de Blizzard semble souffrir de quelques problèmes internes. Ces derniers ne sont pas nouveaux, l’entreprise californienne ayant notamment été poursuivi en justice à cause de harcèlement. Et, tandis que le rachat d’Activision-Blizzard suit son cours en passant devant la Commission Européenne, certains développeurs de Diablo IV ont dénoncé le crunch auquel ils devront faire face pour tenir des délais irréalistes.
Un peu plus tôt dans le mois, des rumeurs annonçaient une date pour l’arrivée du titre. Si avril 2023 semblait cohérent avec l’accélération de la communication autour du jeu, le Store Microsoft aurait fait fuiter une toute autre date. Maintenant officialisé pour le 6 juin 2023, cette date marque également le moment où l’acquisition d’Activision-Blizzard par Microsoft est censé se conclure.
Une pratique que même Lilith craint
Seulement, quelques problèmes se posent en interne. Il est évident pour les développeurs que Diablo IV ne sera pas prêt à cette date, ou en tout cas pas dans un état convenable, s’ils ne pratiquent pas le crunch. Pratique courante depuis des décennies dans le milieu, elle est devenue très controversée depuis quelques années, notamment depuis le cas Cyberpunk 2077. Et si faire quelques supplémentaires peut être un mal nécessaire, il n’est pas normal que cela dure plusieurs semaines, voire plusieurs mois.
Cette nouvelle, bien que très peu étonnante en réalité, n’en reste pas moins affligeante. Contactés par le Washington Post, certains employés de Blizzard, actuels comme anciens, ont évoqué des problèmes internes qui ont ralenti l’avancée du projet. Réécritures, suppression de plusieurs mois de travail ou encore frictions avec les instances supérieures ont notamment rendu ce travail fastidieux. Et Bobby Kotick n’a pas aidé à alléger le poids sur les épaules des développeurs, lorsque ce dernier annonçait en interview que la société perdait en valeur à cause des sorties retardées d’Overwatch 2 et Diablo IV.
« Je pense que ce qui a affecté le cours de l’action plus que [l’enquête sur le harcèlement sexuel] est d’avoir repoussé [les dates de sortie de] Overwatch et Diablo«
Bobby Kotick, interview pour VentureBeat
Évidemment, de nombreux départs ont suivi cette affaire, dont celui de Jesse McCree, alors lead designer sur le jeu. Ce dernier semble d’ailleurs à l’origine de nombreux retards selon les développeurs. En cause, une approche trop dispersée du projet, et une focalisation sur la microgestion. Une fois plongé sur un sujet, impossible de l’en sortir jusqu’à ce qu’il s’en lasse, laissant alors les autres finir ce qu’il a commencé à sa place.
« On pourrait dire qu’ils [McCree et Barriga (anciennement directeur du projet)] n’étaient pas très confiants, il n’y avait pas beaucoup de vision pour le jeu. Ils changeaient beaucoup d’avis, parfois sans même prévenir, sur un coup de tête. Cela a commencé à très lentement épuiser les gens »
Ancien employé de Blizzard anonyme, The Washington Post
Une entreprise qui peine à comprendre ses employés
Mais ils ne sont pas les seuls fautifs, et de nombreux autres départs ont fait souffrir le bon développement du jeu. Seulement, si c’est un processus assez courant, le personnel perdu était, dans l’ensemble, très qualifié. Parfois des vétérans avec des décennies d’expériences, remplacés par des juniors ou ramenés d’autres branches de l’entreprises. Cela a été un impact énorme pour l’équipe, qui ressent une mauvaise gestion du problème par Blizzard.
Depuis son annonce en 2019, Diablo IV a eu droit à plusieurs dates de sorties en interne, poussant les développeurs à pratiquer le crunch pour finir le travail. D’abord prévu pour 2021, c’est finalement décembre 2022 qui fut visé. Au vu du retard accumulé, avril puis juin 2023 furent proposés, cette dernière étant la limite acceptable. Mais, pour les développeurs encore présents, cette date est encore trop limite.
« Nous sommes au point où ils ne veulent plus retarder le jeu. Nous devons donc tous suivre et déterminer à quel point nous sommes prêts à nous faire du mal pour nous assurer que le jeu sortira dans un état suffisamment bon. »
Employé anonyme de Blizzard Albany, The Washington Post
Alors pour les inciter à travailler plus longtemps, quelques stratégies ont été établies. Des crédits repas sont proposés, ainsi que des actions dans la société Activision-Blizzard. Si cela a de quoi faire rêver, le cours de la Bourse fluctue très régulièrement, contrairement à des primes fixes. Et si pour les anciens la valeur pouvait monter jusqu’à 50,000$ d’actions, jamais ils n’ont eu de propositions pour grimper les échelons dans l’entreprise. Pire encore, lorsque l’un d’eux exprimait son envie d’obtenir une promotion, des managers l’incitait à quitter Blizzard, et revenir quelques années plus tard.
Avec tous ces problèmes, les employés craignent quant à la qualité finale du titre. Il est certain que nombreux seront ceux à faire du crunch pour assurer un état correct à la sortie de Diablo IV, au détriment de leur santé physique et mentale. Ils espèrent évidemment proposer un jeu qui saura satisfaire les fans et sera amusant à jouer. Mais ça, seul le temps nous le dira.