Test de Lake : Une aventure narrative qui manque de profondeur
Dans la peau de Meredith Weiss, remplacez votre père pour les vacances à la poste de Providence Oaks, votre ville d'enfance.
Premier jeu de cette ampleur du studio indépendant Gamious, Lake se présente, lors de notre test, comme un retour à la campagne avec des rebondissements inattendus. Le but ? Remplacer votre père en tant que facteur, pour deux petites semaines de vacances. Une idée pleine de promesses.
Ce test de Lake a été réalisé sur PC avec une version commerciale.
Dès les premières minutes, vous comprenez que le jeu ne sera peut-être pas à la hauteur de ses ambitions. Comment expliquer une telle sensation ? Retour sur un graphic adventure games qui ne répondra probablement pas à vos attentes.
Une histoire sans profondeur
Si l’on s’arrête à la présentation du titre, tout va pour le mieux. Vous allez effectivement vivre une aventure narrative qui s’inspire d’autres licences du genre. En vérité, l’histoire de Meredith Weiss, informaticienne mariée à son travail dans les années 80 qui revient dans sa campagne natale pour rendre service à son père, est plutôt charmante. C’est d’ailleurs ce qui attise le plus la curiosité, cette retraite spirituelle, véritable retour au source qui permettra la remise en question de différents choix de vie.
Du silence, un lac à ciel ouvert bordé de forêts et de montagnes. Une activité simple de facteur, des habitants rustiques mais pour le moins sympathiques (en tout cas, pour certains). Lake vous invite à poser un regard différent sur le monde en vous mettant dans la peau de cette héroïne, lessivée par son travail et le monde qui l’entoure. Une expérience bien différente de ce que proposait récemment Road 96, une autre aventure narrative, véritable fuite en avant d’un régime totalitaire.
Malheureusement, la vérité vous rattrape très vite. Car l’ambiance à laquelle vous essayez de vous accrocher s’effrite face à la platitude de l’aventure qui vous attend.
Un monde ouvert vide
C’est littéralement un comble : vous évoluez au sein d’un monde ouvert… totalement vide. Vous pourriez évidemment penser que l’intérêt d’un tel jeu est justement le plaisir de contempler sereinement des paysages magnifiques. Mais vous comprendrez très rapidement que, bien que ces derniers soient agréables à regarder de loin, l’ambiance globale est monotone. Presque vide. Un manque de profondeur d’autant plus inquiétant quand on le compare à des jeux comme Firewatch, Life is Strange ou Road 96, qui sont à la fois contemplatif et intéressants.
Vous ne pouvez pour ainsi dire rien faire à part des tours de fourgonnette sans essence et sans incidence. Car votre seule activité sera de livrer du courrier et des colis. Parfois, quelques livraisons exceptionnelles vous apporteront peut-être un sourire. Il en faut cependant bien plus pour rendre ce gameplay intéressant. Certes, ce n’est pas l’objectif du genre de proposer des besognes à tire-larigot. Mais l’absence quasi-totale d’interactivité laisse pantois.
Bien sur, bien qu’un peu plat et redondant, le décor est plutôt beau. Et l’ambiance sonore qui vous accompagne plutôt charmante. On peut également noter que le catalogue Epidemic Sound est utilisé, permettant aux créateurs de contenus de jouer au jeu sans risque de DMCA (tout du moins, si ils payent un abonnement). Vous pourrez aussi, en cherchant un peu, trouver deux ou trois points de vues sympathiques pour souffler entre vos livraisons.
Mais ensuite, que faire ? Et bien, à vrai dire, pas grand chose. Des petits dialogues vous permettront de faire certains choix qui, comme dit précédemment, pourraient vous débloquer des livraisons exceptionnelles. Ou encore des rendez-vous dans votre agenda.
Sauf que, même pour ça, vous n’aurez aucune action à effectuer. Vous devez juste faire attention à ne pas accumuler des rendez-vous le même jour, au risque d’en rater un. Grosse difficulté.
Des choix limités aux impacts limités
Comme si le manque de contenu ne suffisait pas, même dans les dialogues vous vous retrouvez à vous ennuyer. L’activité de facteur est elle-même plutôt répétitive. Comptez environ 7h de jeu durant lesquelles vous effectuerez principalement des livraisons. Et les quelques échanges avec les habitants de Providence Oaks ne suffisent pas à améliorer l’ensemble.
Non seulement, la plupart de ces dialogues ont tendances à se répéter. Mais en plus, malgré le fait que vous ayez parfois le choix de vos réponses, les conséquences sont limitées. Même si ces décisions font que certains de vos voisins vous détestent, ça ne changera rien ou presque au déroulement de l’histoire. Car au final, vous n’avez encore une fois que deux ou trois choix importants à effectuer tout au long de cette aventure. Et encore, ils n’ont qu’un impact très limité les uns sur les autres.
Pour faire réellement simple, voilà ce que vous pouvez faire ou non en jeu.
- Faire votre travail correctement, ou non (que ça soit la livraison, ou la relecture de contrats).
- Être agréable et serviable, ou non.
- Partir à la fin de votre séjour, ou rester.
- Être en couple avec une personne qui part, ou une personne qui reste, ou rester célibataire.
Tout le reste n’est que simple redondance ou semblant d’activité secondaire. Il faut néanmoins noter que vous aurez l’occasion de prendre jusqu’à 12 photos en jeu, probablement l’activité la plus intéressante de toute votre aventure, qui permet également de découvrir quelques petits bugs amusants.
Des faiblesses dans le développement
Malgré les défauts de gameplay, on aurait pu espérer une bonne physique de jeu, avec peu de bugs. Ou encore, des images soignées avec des textures agréables et des animations adaptées. Malheureusement, la partition jouée est loin d’être parfaite, bien que certains des bugs rencontrés apportent une touche particulière au jeu. S’ajoutent à cela des chargements plutôt longs, alourdissant encore l’expérience.
Beaucoup de chargements pour autant de bugs
Une des premières choses qui vous choquera une fois en jeu, c’est le temps de chargement. Même avec un ordinateur plutôt puissant, le chargement semble assez long, surtout vu le peu d’éléments interactifs. On pourrait se dire qu’un chargement plus long permet de charger l’entièreté de la carte en une seule fois, pour éviter d’autres temps morts. Mais ce n’est pas le cas.
Tout au long de votre aventure et de votre exploration, vous rencontrerez des bugs. Des voitures qui traversent le sol, qui apparaissent et disparaissent à n’importe quel moment. Des hitbox inexistantes (n’avez vous jamais rêvé de traverser un cerf ?) ou au contraire qui sortent de nulle part. Et encore, ne parlons pas ici des maigres interactions avec des éléments de la carte. Sonnez dans le vide puis poser des colis à travers les murs comme le super-héro que vous êtes.
Vous finirez tout simplement par utiliser les fonctions de voyage instantané ou de pilote automatique. Évidemment, ce sont des options qui cassent l’immersion et le RP, mais c’est parfois le seul moyen de ne pas devenir fou. Voire de finir le jeu sans ragequit devant tant de désespoir.
Plus faciles à pardonner, des erreurs de traduction (voire des absences de traduction) sont également présentes pour ceux qui souhaiteraient profiter du jeu en français.
Textures et animations en vacances
Au point où l’on en est, plus rien n’est surprenant. Les animations en jeu sont très limitées. Même pendant les cinématiques, les personnages sont pratiquement immobiles et apparaissent ou disparaissent comme bon leur semble. Encore une fois, seule la partie audio sauve la mise, avec un usage correct de la stéréo et de la spatialisation.
Évidemment, côté texture, rien de bien folichon. Même le décor semble plat. L’ensemble fait que les habitants sont ternes et sans expression. On pourrait se laisser aller à dire que, de loin, ça va encore. Vous croiserez peut-être un ou deux animaux sauvages qui, si vous ne vous approchez pas, sembleront plutôt beaux.
Quand on vise la lune, il ne faut pas rater l’atterrissage
Certains pourraient commenter immédiatement pour préciser que, sur la Lune, on parle d’alunissage. Mais ici, pas d’erreur. Le satellite de la Terre a effectivement été visé. Cependant, dès le démarrage, ça ne part pas. Sans être forcément mauvais, le jeu peine à démontrer quoi que ce soit. À part peut-être la motivation du studio Gamious a vouloir produire plus grand.
Il fallait bien évidemment s’attendre à ce que Lake, ne bénéficiant pas d’un éditeur de grande ampleur, ne soit pas aussi complexe qu’un Life is Strange. De plus, ni la direction artistique ni l’objectif ne sont les mêmes. Mais même sans viser les plus populaires des aventures narratives, il aurait mérité un travail approfondi sur l’immersion.
Le bilan du test
Un jeu qui aurait mérité un peu plus de travail et de réflexion.
Lake n’est pas un mauvais jeu, mais vous n’y passerez pas que des bons moments. On ne peut pas non plus dire que toutes les idées sont mauvaises. Simplement, elles sont soit mal exploitées, soit pas assez. Sincère déception.
Les points forts
- De bonnes idées, une histoire qui aurait pu être intéressante.
- Une direction artistique attrayante, bien que peu exploitée.
- Des ajouts pour simplifier/accélérer le gameplay mais qui manquent un peu de RP.
Les points faibles
- Peu de contenu, on ressent un cruel manque de profondeur avec beaucoup de répétitions et un monde ouvert qui n’est pas exploité.
- Des faiblesses graphiques évidentes, des hitbox incompréhensibles, une physique aux fraises…
- Quelques bugs légers mais trop fréquents.
- Des choix limités que ce soit dans les dialogues ou dans leur impact.