Test de Road 96 : Mile 0, le petit préquel
Jusqu'où aller par amitié ?
Il y a de ça presque deux ans, DigixArt nous embarquait dans un voyage vers la liberté avec Road 96. Au travers de plusieurs road-trips, le jeu nous permettait de suivre différents parcours de vie mêlant notamment histoires d’amitié et politique. Le studio montpelliérain nous propose aujourd’hui de découvrir les origines de son titre à succès avec Road 96 : Mile 0. Un préquel qui promet de nous donner les réponses aux questions encore en suspens après le premier opus.
Ce test de Road 96 : Mile 0 a été réalisé sur Xbox avec une clé fournie par l’éditeur.
Les opposés s’attirent
L’aventure prend place ici en mai 1996, quelques semaines avant les événements de Road 96. Cela fait maintenant dix ans que le pays de Petria a subi un terrible attentat ayant ôté la vie à bon nombre de citoyens innocents. Un drame, imputé au groupe considéré comme extrémiste appelé les Brigades Noires, qui aura donné les pleins pouvoirs au Président Tyrak. Alors que le mandat de ce dernier touche à sa fin et que les élections présidentielles approchent à grands pas, les restrictions se font de plus en plus nombreuses dans tout le pays. C’est dans ce contexte que nous allons suivre Zoé et Kaito. Deux adolescents que tout oppose dans les apparences mais que la passion commune de la musique a su rapprocher.
D’un côté, Zoé que les joueurs du premier opus connaissent bien. Fille du ministre du pétrole de Petria, elle a la chance de grandir dans les quartiers chics du pays, White Sands. Ses voisins ne sont autres que la célèbre présentatrice Sonya Sanchez ou encore le Président Tyrak lui-même. Malgré son confort de vie, elle se retrouve à douter face aux discours politiques tenus par son père et par le gouvernement en place, consciente de certaines injustices.
De l’autre, Kaito est issu du premier titre du studio, Lost in Harmony. Après avoir perdu sa meilleure amie Aya d’un cancer, notamment à cause de la pollution ambiante, il semble ne plus croire en grand chose. S’il peut également vivre à White Sands du fait que ses parents y soient travailleurs, il n’a pas accès aux beaux quartiers. Avec sa famille, il est cantonné aux bas-fonds et subit de plein fouet les inégalités sociales. Il espère ouvrir les yeux de son amie sur les véritables causes de l’attentat de 1986. Et par la même occasion, sur les méfaits du gouvernement.
Une vision tout en nuance
On se retrouve donc à contrôler, à tour de rôle, tantôt Zoé, tantôt Kaito, pour suivre leurs périples dans différentes zones de la ville. Une mécanique qui nous permet de vivre l’aventure à travers des points de vue opposés, même si on se retrouve plus souvent dans la peau de la jeune adolescente. L’objectif du jeu étant clairement de nous expliquer les raisons de son départ de White Sands et pourquoi elle se retrouve à fuir sur les routes de Road 96. Mais si les deux titres sont étroitement liés, pas besoin pour autant d’avoir déjà joué au jeu d’origine pour se lancer dans l’aventure de Road 96 : Mile 0. Les clins d’œil pour les joueurs connaissant déjà Petria sont certes bien présents, mais pour autant, ils n’impactent pas le déroulement des faits.
Durant les phases d’exploration, les échanges avec divers personnages sont nombreux. Certains ont d’ailleurs plus d’importance que d’autres dans l’aventure puisqu’ils auront un impact direct sur la morale de nos protagonistes. Reconnaissable par de petites icônes, les réponses choisies peuvent ainsi faire balancer les pensées de Zoé entre Doutes et Certitudes. Ou encore donner un penchant plus ou moins Révolutionnaire à Kaito.
Il est toutefois compliqué de voir cela comme de véritables choix ouverts tant les actions du gouvernement tendent vers un totalitarisme de plus en plus présent. Il devient ainsi difficile de faire pencher Zoé du côté des certitudes. Surtout lorsqu’on sait qu’elle finira de toute façon sur les routes de Petria en direction de la frontière. En revanche, les choix pour Kaito permettent d’apporter de la nuance dans un discours au départ entièrement pro Brigades Noires. S’il est certain que Tyrak est plus proche du tyran que du président, ses opposants n’en sont pas pour autant des anges. Et les méthodes employées, d’un côté comme de l’autre, finissent par être plus que discutables. Malgré des propos qui restent le plus souvent engagés, Mile 0 s’éloigne d’une vision trop manichéenne de son univers, ce qui n’est pas pour nous déplaire.
Le rythme dans la peau
Une narration bien amenée donc mais qui n’en demeure pas moins trop courte. Ainsi, certains personnages secondaires auraient sans aucun doute mérité de voir leur histoire plus développée. Certaines problématiques manquent également de profondeur, préférant survoler le sujet. Le titre dissémine ainsi de nombreux problèmes de société, tels que le racisme ou les inégalités, pour parfaire son kit du totalitarisme, mais sans rentrer dans les détails. Un choix orienté sans doute pour permettre au titre de rester assez léger malgré les thèmes abordés. D’ailleurs, les phases de tension s’entrecroisent régulièrement de petits moments du quotidien, comme lorsqu’on se retrouve à pousser la balançoire du fils du Président. Mais si le créateur du titre assume n’avoir voulu faire qu’un amuse bouche avec son jeu, cette proposition atteint vite ses limites.
Du haut de ses 5 à 6 heures de temps de jeu, Road 96 : Mile 0 laisse un goût de trop peu. D’autant plus que le jeu ne se compose pas uniquement d’exploration mais aussi de phases d’action rythmique. Totalement sur le même principe que Lost in Harmony, ces moments de run viennent ponctuer chaque fin de chapitre ou décision importante. Un défouloir appréciable qui permet en plus de profiter pleinement des différentes musiques créées pour l’occasion. Une fois encore, le studio a fait un très gros travail sur la bande-son de son jeu et les différents thèmes musicaux jouent parfaitement avec nos émotions au fil de l’histoire.
Dans l’optique d’allonger un peu la durée de vie du jeu, mais également de challenger les joueurs, les différentes pistes musicales pourront être rejouées. Ainsi les amateurs de running pourront tenter de faire grimper leur score jusqu’à atteindre la note parfaite. Le jeu pense également aux collectionneurs avec divers collectables à récupérer dans les différents lieux visités. Un nouveau clin d’œil aux joueurs de Road 96 puisqu’on tombera notamment sur des stickers à l’effigie de personnages bien connus. Mais l’intérêt s’arrête là, surtout pour ceux qui auraient décidé de découvrir Petria par ce nouvel opus.
Le bilan du test de Road 96 : Mile 0
Un goût de trop peu
Mélange d’exploration, de dialogue à choix multiples et de tableaux runner musical, Road 96 : Mile 0 tient en partie ses promesses. S’il nous donne effectivement les raisons de la fuite de Zoé, il reste malheureusement trop en surface sur certains points évoqués. On apprécie que le studio aborde encore des sujets de société graves et parle de politique sans langue de bois. Malgré une durée de vie réduite, Mile 0 sait jouer avec nos émotions aussi bien par sa bande-son soignée que par son histoire touchante. Dommage que l’expérience laisse un goût d’inachevé.
Les points forts
- Une narration engagée et nuancée à la fois…
- Un mélange des genres équilibré
- Un univers musical marquant
Les points faibles
- … mais qui n’offre pas beaucoup de liberté
- Une durée de vie trop courte